Le jumeau numérique : au cœur de la prédiction, la vraie
Jérôme Fenwick, CTO de Synox et Emmanuel Mouton, CEO de Synox
IBM, Dell ou Microsoft, tous les plus gros acteurs de la technologie et de l’informatique ont leur définition du jumeau numérique. Et, rares sont ceux qui n’ont pas commencé à plancher sur le sujet, notamment depuis que le secteur de l’industrie l’a testé et approuvé pour son activité. On se souvient de l’exemple de Renault, qui a utilisé un jumeau numérique de sa supply chain pour gérer sa production, son stock, et l’organisation des équipes. Ce qui leur aurait permis de constater un retour sur investissement en près de 3 mois seulement. Le jumeau numérique a vu le jour entre 2011 et 2012 avec les industriels. Prenons l’exemple du secteur de l’aéronautique, il fallait être capable de visualiser un moteur d’avion modélisé, afin d’améliorer sa conception.
💡 Qu’est-ce que le jumeau numérique ?
« Le jumeau numérique est une représentation identique virtuelle en 3D, d’un objet physique ou d’un système, permettant de tester des situations et anticiper leurs réactions »
Les caractéristiques du jumeau numérique
Jérôme Fenwick, CTO de Synox.
Il faut comprendre qu’il s’agit d’une représentation interactive, qui permet aux utilisateurs de visualiser les réactions de règles et de scenarii sur un jumeau numérique, composé d’espaces et d’équipements physiques. Avec cette technologie, nous sommes en mesure de visualiser toutes les composantes d’un équipement et tous les échanges possibles. Et ce, dans un premier temps à l’échelle d’un bâtiment ou d’un site (avec les Smart Buildings), d’une ville et même, pour les plus ambitieux du monde (metaverse). On peut alors suivre l’évolution de tous types d’objets et systèmes, en fonction d’une multitude de facteurs réels, lors des simulations.
Emmanuel Mouton, CEO de Synox.
En effet, chacun interprète la notion de jumeau numérique selon un cas d’usage un métier et un secteur d’activité :
- le bâtiment
- l’industrie
- la logistique
- ou encore pour une collectivité
La vision et les attentes des utilisateurs ne seront pas les mêmes non plus. Le plus important à comprendre avec le jumeau numérique (ou « Digital Twin » en anglais) c’est que son intérêt principal réside dans la simulation.
Exemple d’utilisation d’un jumeau numérique
On utilise le jumeau numérique d’un avion pour simuler des situations réelles et anticiper l’impact des facteurs de risques dans la réalité.
En tant qu’outil, le jumeau numérique apporte une vision consolidée de tous les équipements à la fois avec une grande visibilité et lisibilité des données à la suite des tests effectués.
Une variable modifiée, et c’est toute la cadence de production qui est modifiée. On peut ainsi mesurer l’impact sur l’usure des pièces et la consommation des équipements et des machines. Tout peut être modélisé et peut interagir en conséquence.
Comme l’explique le JDN, dans son article du 23 juin 2022 :
« Ces jumeaux numériques vont révolutionner les opérations de simulation dans l’usine 4.0 (IIoT). »
« Avec le jumeau numérique, nous partons de quelque chose de très théorique au départ et nous l’adaptons à des enjeux terrain. »,
Emmanuel MOUTON, CEO de Synox
Et le BIM dans tout ça ?
Le BIM (« Building Information Modeling ») ou « Modélisation des informations du bâtiment en français » est une maquette 3D d’un bâtiment qui permet de gérer le projet de construction avec des données fiables. Mais, le BIM n’est qu’une partie du jumeau numérique, figé à l’instant T. Nous, nous allons l’animer pour faire évoluer l’état de ce plan 3D et qu’il interagisse avec le monde réel.
Il existe deux approches différentes pour travailler sur des jumeaux numériques. L’une dite « bottom up » qui s’appuie sur le principe bien connu du machine learning et de deep learning, grâce à l’apprentissage de données récupérées via des capteurs. L’autre appelée « top down » se base sur des modèles mathématiques dès le début.
« Dans le Smart Building, on parle souvent du BIM et du BOS (« Building Operating System »), la technologie du jumeau numérique est un peu « l’Operating System » qui permet d’interagir et d’avoir cet environnement numérique interactif à distance pour mener ses opérations. Si je simule un état, quel va être son impact ? Si j’ouvre une porte pendant une durée donnée, quel sera l’impact sur la température intérieure ? »
Jérôme FENWICK, CTO de Synox
Comment se positionne Synox ?
Emmanuel Mouton, CEO de Synox.
Chez Synox, nous sommes pionniers de l’IoT, nous partons de l’existant et nous apprenons des données que l’on permet à nos clients de récolter. L’exploitation de ces données, couplée à la gestion des objets connectés, nous permet de faire de l’automatisation et de l’anticipation pour toujours être dans une démarche d’amélioration.
« Quelque part, le jumeau numérique oblige aussi à mesurer des choses que l’on ne mesurait pas avant. »
Jérôme Fenwick, CTO de Synox.
Avec l’IoT nous pouvons tout gérer à distance, l’objectif est donc de remonter les données et les représenter de façon lisible et intelligible avec des éléments de contexte. Ce qui va permettre au jumeau numérique de les interpréter et d’analyser les facteurs et les déclencheurs. Tout cela, grâce à la simulation.
« Avec cette technologie, nous allons mieux résoudre les problèmes, les anticiper et prendre de la hauteur pour changer de point de vue. »
Le rôle du jumeau numérique en fonction des secteurs d’activité
Dans l’industrie (supply chain)
Gain de fiabilité des produits
Renfort de la sécurité
Amélioration du rendement
Maintenance conditionnelle
Réduction des coûts de réparation
Anticipation des défaillance
Dans la santé
Test de traitements sur un patient virtuel (jumeau numérique) avant le patient réel
Simuler des opérations complexes
Tester la qualité et la résistance de dispositifs médicaux
Tester les effets d’une molécule sur un organisme vivant
Mais alors, qui peut se lancer dans une telle innovation ?
Jérôme Fenwick, CTO de Synox.
Il faut être honnête, la création d’un jumeau numérique est complexe et nécessite un grand nombre de ressources, accessibles aux plus gros budgets. Il y a des étapes cruciales pour lesquelles les moyens à déployer sont importants (la modélisation initiale par exemple). Et, au-delà des ressources il y a les craintes à dépasser. Lorsque l’on plonge dans un environnement aussi complexe à modéliser, on se rend compte de toute la face cachée de l’iceberg que l’on ne connaît pas suffisamment. Chez Synox, notre positionnement est de continuer à simplifier et rendre accessible à tous, la technologie.
« Pour cela, nous n’allons pas réinventer la roue, nous allons faire confiance à nos partenaires qui travaillent sur ce sujet depuis longtemps et dont c’est la spécialité, comme nous l’avons toujours fait. ».
Après 15 ans d’expérience, nous sommes conscients de ce qui relève du phénomène de tendance et ce qui va réellement contribuer à améliorer le monde. Il est assez logique que tous ceux qui font de la gestion d’assets (comme nous avec notre plateforme SoM2M#IoT) veulent intégrer ces données à la technologie du jumeau numérique. C’est tout notre écosystème qui est sensibilisé.
Emmanuel Mouton, CEO de Synox.
Il y a une obligation de se spécialiser. L’expression « Jumeau numérique » est beaucoup employée mais dès lors que l’on parle de transformation numérique, il y a énormément d’éléments différents à prendre en compte, comme la représentation du parc d’équipements, la modélisation de la structure, les algorithmes d’analyse des données, le déclenchement des simulations etc… Beaucoup d’acteurs sont présents dans le BIM (« Building Information Modeling ») mais qu’en est-il du temps réel ? ceci est lié à chaque métier, et il faut être capable de s’adapter.
« Il faut vraiment amener une vision transversale et globale grâce à la compétence de chacun. »
Avec qui travailler sur cette technologie ?
Jérôme Fenwick, CTO de Synox.
Cela fait quelques années que l’on prépare le terrain chez Synox. Nous avons deux approches : le jumeau numérique au sens propre avec le BIM, le BOS, pour lequel nous travaillons déjà avec des partenaires experts sur le sujet. Et, l’intégration des données sur laquelle nous travaillons aussi avec un partenaire dont c’est le métier. Ce type de projet est pour l’instant destiné à des sociétés comme les complexes immobiliers, qui ont beaucoup d’automates, des coûts d’exploitation et un niveau de service requis importants.
« Pas de starter kit du jumeau numérique pour le moment mais, nous sommes déjà capables de modéliser un bâtiment sur un plan 3D interactif. Avec un « BOS » à positionner (c’est-à-dire les capteurs et les actionneurs), un référentiel de gestion des assets plus précis et analyser et visualiser les données sur notre plateforme SoData#Viz. »
Emmanuel Mouton, CEO de Synox.
Pour la partie simulation (algorithmique : avec les modèles mathématiques) nous travaillons avec les spécialistes de la « data » et de l’intelligence artificielle. La prochaine étape étant d’arriver à déclencher une simulation depuis un objet et d’interpréter les données de ce scénario de simulation.
« On y est déjà ! Avec le suivi de la localisation des personnes dans les tunnels pour la SNCF que nous avons mis en place en 2020, grâce à la modélisation des gares. Pour nous, l’innovation n’est jamais vraiment finie, nous sommes très investis dans nos POC en cours sur les plans 3D interactifs. »
Modéliser toute une ville, c’est possible ?
Emmanuel Mouton, CEO de Synox.
Nous avons répondu à un appel à projet du territoire d’innovation avec la métropole, au niveau national.
Nous avons pu modéliser la ville sur une cartographie (des canalisations jusqu’aux boîtes aux lettres).
Ensuite, c’est l’intégration des capteurs qui lui permet de devenir un jumeau numérique (avec une heatmap, le parc d’objets connectés etc…).!
« On parle alors du CIM (« City Information Modeling »). »
Le cas d’usage que l’on retrouve le plus dans la Smart City est lié au transport. Avec le transfert modal, on recherche à dimensionner les pistes cyclables et prendre les bonnes décisions pour réduire l’impact sur les routes, les feux de circulation et sur le trafic et la pollution qui en découlent.
Le transfert modal ?
Un « transfert modal » signifie :
passer d’un mode de transport à un autre.
C’est le principe de la « mobilité ».
Jérôme Fenwick, CTO de Synox.
Si je devais conclure sur un enjeu essentiel à prendre en compte, ce serait la cybersécurité. Il va être important mais complexe de simuler des attaques ou un comportement humain. Tout réside dans la qualité de la simulation pour que les scénarios de prédiction soient efficaces. Avec nos capteurs, (qui sont des objets physiques), nous devrons être capables de simuler l’anticipation de mesure des capteurs. Le jumeau numérique va nous permettre d’améliorer tous les modèles mathématiques de simulation.